dans Lecture

On a lu pour vous …

Une lecture nécessaire en ces temps tourmentés pour la santé : revenez aux fondamentaux !

La vie, la mort, la vie – Erik Orsenna

Edition Fayard

PETITE ENIGME… Quel savant du XIX° siècle s’il vivait parmi nous aujourd’hui, dans le contexte que l’on sait, refuserait de serrer les mains, sachant à quel point elles peuvent être porteuses de germes ? Qui aurait tonné pour le port du masque et le lavage et la désinfection systématique des mains ? Indice : il s’agit d’un scientifique français qui, à la suite d’autres précurseurs, a fait faire un bon de géant à l’humanité, grâce à ses découvertes sur la capacité de nuisances des « micro-organismes » ? Vous séchez ? Lisez la suite… 😊

Erik Orsenna, célèbre homme de lettres français, est un académicien malicieux et curieux de tout. Il occupe le siège de celui qu’il décrit comme LE savant du XIX° siècle, Louis Pasteur (1822-1895). Encouragé par son voisin (François Jacob, autre célèbre scientifique) siégeant près de lui à l’Académie française, Orsenna s’est pris au jeu de découvrir la vie et l’œuvre de Pasteur. Le tout donne un livre enjoué, somme de longues recherches mais qui sont rendues parfaitement accessibles par Orsenna lui-même, qui se décrit comme un « ignorant abyssal en biologie ». Il y décrit aussi « l’envers du décor » : le caractère irascible du Grand homme, ses exigences envers son entourage familial et ses collaborateurs… Il se murmure d’ailleurs qu’il s’est largement inspiré de certaines de leurs hypothèses. Orsenna ne l’occulte pas, tout en mettant en avant ce qui fait la singularité de Pasteur : son énorme force de travail (« un jour sans travail est un jour volé » …), sa capacité à rassembler, à un moment donné, tous les savoirs produits sur une question pour faire un pas décisif dans la connaissance, sa capacité de synthétiser tous ces savoirs épars pour percer les mystères de la vie, de « l’inexpliqué ».

POURQUOI CE LIVRE ?

Parce que qui fait (aussi) la richesse de cet ouvrage, c’est sa modernité (quelle résonnance avec ce que nous vivons !). On y découvre d’autres facettes : d’une part la mise en contexte de l’état d’esprit de l’époque, assoiffé de connaissances, et d’autre part, l’état des lieux actuel de la poursuite, dans le monde entier, des travaux initiés par Pasteur.

Bien sûr, Pasteur restera pour l’éternité LE découvreur du vaccin contre la rage…. Mais… quoi d’autre ? Savez-vous que, natif de la région d’Arbois, Pasteur a toujours été très attaché à cette région ? Qu’il a voué une grande tendresse à son père, qui en retour, l’aimait grandement (« C’est un père qui toujours préférera son fils à toutes les hautes ambitions qu’il a pour lui », selon la jolie formule d’Orsenna).

Lui qui luttait avec tant d’acharnement contre la mort (travailleur sans relâche, il connaitra pourtant l’insuccès pour son baccalauréat… mais à force de travail, deviendra agrégé !), il aura la douleur de perdre sur une brève période, ses parents, ses sœurs mais aussi 3 de ses filles : « que reste-t-il d’autre sur terre que le travail ? » déclara-t-il alors.

Ce qui est frappant dans ce livre, c’est de mesurer à quel point, à l’époque, les applications concrètes suivaient de près les avancées scientifiques. Pasteur a ainsi débuté ses travaux en état au départ mandaté par les autorités pour découvrir les micro-organismes responsables des dégâts provoquées… dans les domaines des alcools (bière et vins) et chez les vers à soie ! De ses travaux et observations naîtra la connaissance de la « fermentation », l’un des mécanismes de la vie.

La légende de Joseph Meister

Vous connaissez sans doute l’histoire – la légende du jeune Joseph Meister, qui en 1885, est victime de la « rage » (le mot fait encore frémir !) suite à une grave morsure d’un chien lui-même atteint. Transporté à Paris, il y rejoint l’équipe de Pasteur. Ce dernier a testé sur des animaux le principe de la vaccination : prélever sur un animal mort, le « microbe » actif (mot du linguiste Littré, qui donna son nom au dictionnaire du même nom), en renforcer la puissance, puis l’assécher » ensuite pour le rendre quasi-inoffensif ? Enfin, l’inoculer à nouveau, à des doses de plus en plus fortes. L’organisme de l’hôte ayant ainsi identifié l’indésirable, il établit des défenses contre lui (sa fameuse immunité) : il est « vacciné ».  Mais ces expériences se cantonnaient jusqu’ici à des animaux ! Il faut sauter le pas devant le petit Joseph, ce qui sera chose faite… avec la réussite que l’on sait. Joseph restera le gardien de l’Institut Pasteur (qui ouvrira ses portes quelques années plus tard, grâce à des dons venus du monde entier) jusqu’à sa mort en 1940.

« Guérir parfois, soulager souvent, écouter toujours »

Cette maxime que l’on attribue à Pasteur (et qui viendrait en droite ligne d’Hippocrate) résume le 3° verbe du titre d’Orsenna : la vie, malgré tout. Qui se donne à voir à travers la poursuite des travaux de Pasteur, partout dans le monde, dans des Instituts qui portent son nom[1]. Dans sa vision de la science, qui continue aujourd’hui : une science au service du public, une science qui s’enrichit de ses liens avec « le terrain », hors du cadre du seul « labo ». Et, dans la période qui nous occupe, sa conviction qui est plus que jamais d’actualité : des agents responsables d’une maladie, s’ils se propagent d’un organisme à l’autre, la diffusent, et la seule manière d’empêcher cette contagion, c’est… l’hygiène.

Tiré de : https://www.rtbf.be/info/societe/detail_coronavirus-tous-les-symptomes-infos-utiles-et-gestes-essentiels-en-une-infographie-a4-a-imprimer?id=10446638

[1] https://www.pasteur.fr/fr. Ironie de l’histoire, l’une des « fake news » le plus répandues autour de la Covid-19 incrimine le laboratoire de l’Institut Pasteur (Paris), accusé d’avoir créé le virus et qui a porté plainte contre ces diffamations répandues via les réseaux sociaux.

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