On a lu pour vous …
Au fil des vents – Collectif d’écriture
Editions RAANM – Regroupement des aidantes et aidants naturels de Montréal
ISBM 978-2-9804944-5-1
Au fil des vents est un livret, édité par une association d’aidants proches de Montréal. Il est composé de 7 « récits de vie » rédigés par les aidants, épaulés par une écrivaine. Chacun y expose la « prendre soin » qu’il a pu déployer auprès de son proche, entre admiration, tendresse et désarroi.
Ce petit ouvrage de 40 pages, poétiquement illustré, est un recueil de 7 récits d’aidants proches Canadiens francophones.
Parmi eux, « Ma lumière » relate la rencontre de Marc avec un « petit homme dans la trentaine, tout croche et tout frêle » qui deviendra son meilleur ami. A son contact, Marc comprendra que les limitations physiques de Robert ne peuvent arrêter une vie en mouvements, faites de défis et de projets.
« Pour son bien et pour le mien », le récit d’une mère monoparentale avec un fils autiste, relate le nécessaire placement de son fils au sein d’une famille d’accueil, au terme d’une « spirale épouvantable » dans laquelle elle ne reconnaît plus ni son fils, ni elle-même. En parallèle, elle dit à quel point la découverte d’un groupement d’aidants a été, en contrepoint, un « grand bonheur magique ». De plus en plus impliquée, Denise, la mère, plaide désormais pour une reconnaissance des aidants (et de leurs associations) par les pouvoirs publics : une contrepartie pour tout ce travail silencieux accompli…
« Prendre soin de soi », un court poème, rappelle la nécessité de prendre du recul car la vulnérabilité de l’autre touche et fragilise aussi son aidant. Être conscient de cette fragilité commune nécessite de la foi, de la solidarité pour mieux « écouter tout ce que notre cœur nous dicte ».
Cette idée de transmission est aussi au centre de « La gifle et la caresse » : les générations se succèdent, entre fin de vie des aînés, et (re)naissance(s), la Vie s’écoule en mystère.
La vie, le caractère bien trempé de l’amie, de la mère, orientent le récit de « L’échappée belle », où un accompagnement de fin de vie, ponctuée par la morphine, les soins, la musique, mais aussi des relations douces-amères avec l’entourage élargi, se clôt.
Pour autant, ces récits, douloureux, poétiques, lumineux, ne sont pas des « bisounourseries ». Ils disent aussi la difficulté d’être « aidant ». Ainsi, Marc, charmé par la rencontre avec Robert, si plein de vie, mettra du temps avant de réaliser la nécessité d’un répit et de retrouver sa juste place auprès de sa compagne. « Trahir sa promesse » rappelle qu’être aidante de sa mère âgée, deux fois esseulée, dont la vieillesse s’accompagne de soucis de santé, nécessite un balancier perpétuel entre négociation (d’une entrée en centre de jour, à laquelle sa mère consent) et rebuffade (l’hébergement final, nécessaire mais désolé, en maison de repos). Malgré le soutien des autres résidents, malgré la découverte de nouvelles facettes de la personnalité de sa mère, cette aidante conclut son récit : « je suis seule dans ma promesse trahie ». Le séjour en hôpital « au 8° étage » de son proche, contraint Danielle à faire l’impasse sur sa propre santé, à prendre soin des siens restés au foyer, en « cavalant » à l’hôpital au besoin… Danielle devra aussi se faire violence, combattre le renoncement qui tente son compagnon, pour l’encourager à se lever, à marcher. Dans son combat, elle observe la « préposée aux soins », Solange, une bénévole : son attitude et son énergie, elle les reprendra à son compte.
Les dernières phrases résument l’énergie, la ténacité, les hauts et les bas qui ponctuent tous ces parcours d’aidance. Plaignant la Mort (qui ne sait pas à quoi elle s’expose en accueillant ce proche aidé, aimé :« [elle va] en cracher son dentier ! »), le livre se termine sur ce cri du cœur : « Clara Ravenelle, Dieu du ciel ! que tu as joliment bataillé ! » On ne dirait pas autre chose des aidants…