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Le secteur du « domicile » à l’épreuve du (1°) confinement
Actes du colloque : « le (dé)confinement… Made in aidants proches… »
Geneviève Aubouy (Chargée d’études) à l’ASBL Aidants Proches | Septembre 2021
Source :
Dernier tour de piste des « actes » du colloque de l’ASBL Aidants Proches… Une date anniversaire, puisqu’il s’est tenu voici un an, en octobre 2020 ! L’heure est venue de voir les « vécus, besoins, limites, ressources » … dans le domaine du « domicile », ainsi que les préconisations et pistes qui étaient de mise à l’époque, pour l’après-COVID.
Pour accéder au « colloque » dans toutes ses dimensions (actes, livre d’or, évaluation, présentations des exposés…), suivez le guide !
Le but du colloque ?
Mettre en lumière le vécu de ce (dé)confinement contrasté, comprendre la manière dont cette pandémie a été vécue en invitant des experts à partager leurs analyses. Ensuite, encourager la parole (lors d’ateliers) de tous ceux qui ont été en « 1° ligne » : aidants, professionnels, mais aussi citoyens. Construire cette réflexion collective : témoigner, synthétiser les constats, faire fructifier tous ces enseignements tirés de cette période troublée… pour mieux préparer l’avenir.
Comment ?
Durant l’après-midi, 3 thématiques ont été explorées pendant les ateliers : le domaine du « handicap », celui du « grand âge » et celui du « domicile ».
Quelle méthode a été employée ?
Pour chacun des domaines explorés en ateliers, les verbatims des participants ont été classés en 2 grandes rubriques :
La 1° : les « vécus, besoins, limites, ressources » mis en évidence durant le 1° confinement ;
La 2° : les « initiatives, propositions, revendications » pour l’avenir. Quand cela s’y prêtait, ces 2 catégories voyaient ensuite un focus sur la manière dont les participants des ateliers, envisageaient l’avenir : le (dé)confinement et une nouvelle manière de « faire société » sur base de ce qui avait été durement appris durant la pandémie.
Au sein de ces 2 rubriques, nous avons différencié 3 niveaux de récits, de propositions :
Le niveau macro :
Il renvoie à la dimension sociétale et englobe de grandes thématiques. Il questionne les politiques en matière de santé, la loi de reconnaissance des aidants proches (AP)… Il cible tout ce qui relève, en Belgique, de l’Etat fédéral ;
Le niveau méso :
Il comprend le réseau des organismes, les associations actives à une échelle « régionale » (ex. : les entités fédérées de la Wallonie ou de la Région de Bruxelles-Capitale). Mais ce niveau comprend aussi, entre autres, les structures d’hébergement, les fédérations de professionnels du domicile… Au sein de celles-ci, on y retrouvera la vision globale des directions et des encadrants d’équipe, ainsi que les vécus de ces équipes ;
Le niveau micro :
Il comprend le vécu intime, individuel, rapporté par les AP, les professionnels, les citoyens… Il comprend aussi la dimension inter-individuelle lorsque les récits portent sur la relation entre un « bénéficiaire », une famille, un professionnel.
Quels ont été les « fils rouges » déclinés lors de ces ateliers sur le domicile ?
Contrairement aux secteurs « institutionnels » (maisons de repos et de soins, hébergement de personnes en situation de handicap…), le « domicile » a été le lieu d’un paradoxe : le confinement « en sécurité » chez soi voyait tout de même l’arrivée de professionnels, allant de domicile en domicile… Du coup, était-on dans la préservation de la qualité de vie des personnes aidées chez elles, ou dans l’amplification du risque sanitaire par la multiplication des visites ?
A cela s’ajoute le fait que, un peu comme les aidants proches, le secteur des professions actives en « 1° ligne » a été le grand oublié des livraisons de matériel et d’équipement de protection : la débrouille a été de mise… Non seulement pour trouver/fabriquer des masques, par exemple, mais aussi pour réorganiser les plannings des passages des professionnels à domicile, entre crainte des travailleurs, nécessité de se (re)centrer sur des bénéficiaires isolés, demande d’arrêt des prestations…
Inutile de dire que, comme l’atteste l’enquête sur le vécu des aidants en confinement[1], ceux-ci ont payé un lourd tribut, face à l’arrêt des passages des professionnels du domicile. Ce sont les aidants qui, une fois de plus, ont été à la manœuvre pour assurer encore davantage et sans plus de répit, l’aide journalière, les soins, le réconfort, les occupations… de la personne en perte d’autonomie qu’ils accompagnent.
A noter que les « bénéficiaires » du domicile » (dont une grande part de seniors) ont gardé, aux dires de leurs aidants, une latitude d’action et de choix, face aux mesures sanitaires drastiques : c’est ainsi que certains aînés ont voulu à tout prix garder un lien physique avec leurs proches, quitte à risquer d’attraper le virus de la Covid…
Face à la réorganisation exténuante du secteur du domicile, les « encadrants » des équipes ont été particulièrement sollicités pour déterminer les bénéficiaires en situation critique, pour lesquels l’aide ne pouvait cesser. D’autres secteurs (AViQ, mutuelles…) ont innové : en réorientant leur mission première (ex.: en passant d’un objectif de contrôle, à celui d’épauler les familles fragiles), voire leurs modes d’action (plus de contacts ni de permanence physique ? En réponse, les équipes ont empoigné leurs téléphones pour garder le lien avec leurs publics…).
Malgré ces initiatives porteuses de lien, celles-ci n’ont pas suffi pour une frange bien précise : les personnes, les familles déjà fortement précarisées, bien avant la crise, qui ont tout à coup « disparu des radars ». Les situations complexes impliquant des problèmes de santé mentale, ont aussi flambé…
Ce déchirement du tissu social met en évidence 2 choses : la 1°, ce sont que les aidants, les « vigies » des situations complexes à domicile, ont aussi été les oubliés de la crise. Réquisitionnés pour soutenir des proches vulnérables, dans des situations déjà connues, leur avis, leur vécu n’ont pas été des données qui ont figuré dans l’équation du « maintien à domicile en pandémie ». La 2°, c’est que des situations déjà tendues avant la crise, se sont bel et bien « cassées la figure » durant le confinement : elles deviennent difficilement rattrapables… et ce, alors même que de nouvelles situations encore plus dramatiques émergent en post-confinement…
[1] https://wallonie.aidants-proches.be/wp-content/uploads/2021/05/210505-rapport-final-analyse-resultats-enquete-vecu-des-ap-pendant-le-confinement-lie-a-la-covid-19_def.pdf
En termes de pistes, quelques points forts sont à relayer :
La « gouvernance » a largement été débattue, sous plusieurs angles : comment faire en sorte que cette crise renforce la solidarité collective ? Il est question de « sauvegarder » la sécurité sociale, notre « trésor vivant national », sans minimiser les initiatives solidaires nées durant la crise, « des gens face aux gens ». Pour autant, il ne revient pas à ce niveau individuel informel, de pallier les manquements du politique, dans la gestion de la santé publique.
L’importance de la « proximité » s’incarne particulièrement dans les attentes des citoyens, face aux communes, qui bien souvent, avaient elles-mêmes activé des garde-fous (numéros d’appel d’urgence), pendant la crise, peu utilisés car peu connus ! Si une telle catastrophe sanitaire devait se reproduire, il y a urgence à réfléchir au rôle d’une « 1° ligne » (communale) avant la 1° ligne (d’aide et de soins) évoquée sous la forme d’un ombudsman.
Si le déconfinement doit s’envisager comme un processus, il devra y figurer la question de la valorisation des métiers de 1° ligne – et de leur reconnaissance statutaire, barémique… En parallèle, le même constat vaut pour les aidants, qui n’ont pas baissé les bras pour, jour après jour, apporter une qualité de vie et d’accompagnement, auprès de leurs proches vulnérables.
Pour la suite, les professionnels présents insistent sur la nécessité de renforcer des passerelles « interservices », voire « inter-secteurs », seule manière de renforcer le maillage pour éviter que les plus précaires ne passent entre les mailles du filet de protection sociale
Last but not least, les participants des ateliers du domicile appellent de leurs vœux des « états généraux de l’aidance »… Belle idée ! 😊
POUR LE COMPTE-RENDU COMPLET DES ACTES, SUIVEZ LE LIEN !
Une articulation inédite ! Durant le colloque, nombre d’entre vous ont marqué un vif intérêt à propos de l’enquête belge sur « le vécu des aidants proches durant le confinement ». A l’époque, seuls quelques résultats préliminaires avaient été présentés… Ils sont désormais beaucoup plus étoffés !
Voyez par vous-même !